À travers les souvenirs et les fantasmes du commis voyageur, c’est le portrait de toute une famille qui est brossé.
Willy Loman exerce la profession de commis voyageur depuis plus de trente ans. Marié à Linda et père de deux enfants maintenant adultes, il a toujours passé ses journées loin de son foyer, à sillonner les routes et à se battre pour conquérir de nouveaux clients. Aujourd’hui, c’est un homme épuisé, confronté à une société qu’il ne comprend plus : le monde des affaires en particulier s’est métamorphosé, et Willy peine à maintenir la performance qu’on attend de lui. Enfermé sur le passé et sujet à des crises de confusion, il semble tout de même galvanisé par le retour à la maison du fils prodigue : Biff. Ses derniers espoirs reposent désormais sur ce fils qu’il admire plus que tout et sur lequel il projette de grandes ambitions.
À la manière d’une enquête, d’un puzzle mental, ressurgissent tour à tour les joies et les victoires passées, les mensonges et les trahisons, les secrets enfouis…
Philippe Baronnet n’actualise pas sottement le texte et joue davantage sur les sons que sur les décors. Une mélancolie quasi tchékhovienne baigne le spectacle, où non seulement un homme mais aussi des relations familiales, sociales et professionnelles s’effondrent doucement, pointant la déshumanisation à venir. – Télérama
Création 2024 
		    Texte : Arthur Miller – Nouvelle traduction : Kelly Rivière commande de la compagnie – Mise en scène : Philippe Baronnet – Lumière : Maxime Rousseau – Son : Haldan de Vulpillières avec le renfort en régie Jean-Baptiste Augros – Costumes : Émilie Baillot – Perruques, maquillage : Cat Vandamme –  Collaboration artistique : Alain Deroo, Marie-Cécile Ouakil, Michaël Pruneau – Production : Jérôme Broggini – Avec : Vincent Garanger, Anne Cressent, Marc Lamigeon, Romain Fauroux, René Turquois, Samuel Churin, Nine de Montal, Philippe Baronnet.
© Photo : Victor Tonelli
Production déléguée : Les Échappés vifs. Coproduction : Théâtre Montansier - Versailles, Théâtre de Rungis, Le Trident - SN Cherbourg-en-Cotentin, Théâtre municipal de Coutances, DSN-Dieppe Scène Nationale, CA Mont-Saint-Michel Normandie. Résidences de création : Théâtre de la Ville de Saint-Lô, Dieppe Scène Nationale, Théâtre de Rungis, TM Coutances, Théâtre Montansier Versailles. Aide : Région Normandie, Adami. Soutien : Théâtre de Sartrouville et des Yvelines CDN, Opéra de Rouen Normandie, CDN de Rouen Normandie, Ville de Marchésieux, SACD Pôle auteurs. Arthur Miller et ses ayants droit sont représentés en France par l’agence Drama - Suzanne Sarquier. Les Échappés vifs, compagnie implantée à Sourdeval, est aidée par le Ministère de la culture DRAC Normandie et le Conseil départemental de La Manche au titre du conventionnement.
Créé en 1949, Mort d’un commis voyageur dresse un portrait tout à tour doux et tragique de la vie de Willy Loman, commis voyageur arrivé à l’aube de la vieillesse et licencié par l’entreprise pour laquelle il a travaillé pendant trente-cinq ans. A travers le surgissement de flashbacks et de souvenirs plus ou moins fantasmés où affleure une lancinante mélancolie, cette pièce interroge la complexité du lien filial tout en auscultant la violence d’une société capitaliste obsédée par la réussite matérielle.
Mon désir de mettre en scène ce texte très connu d’Arthur Miller est lié à la force dramatique de cette histoire bouleversante, qui nous parle à la fois de l’individu et de la société. Familial, aussi bien que social, psychologique et politique, ce chef-d’œuvre parle à toutes et à tous de sujets intemporels : l’amour, le rapport à la mémoire, à l’enfance et à la famille, les relations professionnelles, les rapports de classe, l’éducation et la transmission, le passage du temps... En scrutant le destin de Willy et des siens, Miller fait apparaître une société en voie de déshumanisation, ivre de progrès et de consommation.
Mais l’auteur est avant tout un homme de théâtre qui invente ici un héros magnifique, dont la maladresse et l’aveuglement produisent des scènes poignantes et poétiques, où l’émotion déborde. Le défi que représente ce personnage pour le jeu et la mise en scène m’encourage à poursuivre, comme dans mes précédents spectacles, une réflexion sur l’intime, l’importance du détail et l’effet de proximité avec le corps de l’acteur, pour amener celui-ci vers une parole provoquant la catharsis. Le choix du principal interprète est donc un point déterminant dans la construction du projet. À l’exception du héros, certains acteurs incarneront plusieurs personnages secondaires, précipitant ou essayant d’empêcher l’issue fatale... Car si le titre annonce la fin tragique du commis, la mise en scène doit nous tenir en haleine, telle une enquête existentielle sur les remords et regrets d’un vieil homme, à l’heure du bilan.
Autour de Willy, faire le choix d’acteurs qui pourront endosser plusieurs personnages, c’est aussi faire entrer le spectateur dans la vision confuse du protagoniste et créer l’« inquiétante étrangeté » générée par son angoisse. Mort d’un commis voyageur met en scène cette démence teintée d’amertume, d’autant plus troublante que dans le monde nouveau qui advient sous les yeux de Willy, tout semble périssable et vieillir vite…
Aujourd’hui, mettre en scène Mort d’un commis voyageur est une façon de continuer à explorer la thématique familiale qui se trouve au coeur de la plupart de mes spectacles, et de rendre à la scène toute la puissance dramatique de ce chef-d’oeuvre des années cinquante. En commandant à Kelly Rivière une nouvelle traduction de la pièce, je ne compte ni dénaturer, ni actualiser outrageusement le propos. En revanche, il me semble essentiel qu’une oeuvre aussi puissante, notamment dans les échos vibrants qu’elle trouvera auprès de la jeune génération, puisse être incarnée dans une langue simple, fluide et directe. À la fois contemporaine par ses enjeux socio-économiques et profondément américaine dans sa dimension sentimentale, cette pièce offre pour moi un nouveau lieu de dialogue avec ce qui nous est le plus intime : le rapport à nos proches, à nos parents et nos enfants.
C’est aussi travailler sur une dramaturgie complexe, aux accents cinématographiques. De manière très originale pour l’époque, l’auteur construit dans cette pièce un univers mental où coexistent plusieurs réalités et temporalités, qui invite à de nombreuses inventions au plateau. Avec l’aide de compagnons fidèles à la scénographie, au son et à la lumière, je suis convaincu que nous pouvons renouveler aujourd’hui l’esthétique et le rythme de cette oeuvre, lui donner un souffle inédit, tout en restant au plus près des personnages et des situations.
D’aucuns ont lu du pessimisme dans Mort d’un commis voyageur. J’y vois davantage un regard acéré et lucide de Miller sur son époque, une forme de fatalisme certes, mais pas dénué d’humour, et une tendresse lumineuse pour ses personnages. A travers le parcours du commis, la pièce s’inscrit dans notre temps et nous parle surtout d’amour et de combat pour la dignité.
Philippe Baronnet, septembre 2021
IER EXTRAIT - ACTE II traduction en cours par Kelly Rivière, 2021
WILLY. – […] Il s’appelait David Singleman. Il avait 84 ans et il avait trimballé ses marchandises dans trente-et-un États. Et le vieux Dave, il montait dans sa chambre, il enfilait ses pantoufles en velours vert – je n’oublierai jamais ça – il décrochait son téléphone, il appelait les acheteurs, et sans jamais quitter sa chambre, à 84 ans, il gagnait sa vie. Quand j’ai vu ça, j’ai réalisé que le métier de vendeur était la meilleure carrière qu’un homme puisse faire. […] Savez-vous que quand il est mort – et d’ailleurs il est mort d’une mort de commis de voyageur, dans le wagon fumeur du New York - Boston, avec ses pantoufles en velours vert aux pieds – quand il est mort, des centaines de vendeurs et d’acheteurs sont venus à son enterrement. L’ambiance était triste dans beaucoup de trains après ça. [Il se lève. HOWARD ne l’a pas du tout regardé.] À cette époque, il y avait du style dans tout ça, Howard. Il y avait du respect, de la camaraderie, et de la reconnaissance. Aujourd’hui, tout s’est asséché, tout est décidé à l’avance, et il n’y a plus aucune place pour l’amitié – ou le style. Vous voyez ce que je veux dire ? Plus personne ne me connaît.
HOWARD s’éloigne, par la droite. – C’est bien çà le problème, Willy.
WILLY. – Si j’avais quarante dollars par semaine – c’est tout ce dont j’aurais besoin. Quarante dollars, Howard.
HOWARD. – Mais je ne peux pas tondre un œuf, mon petit, je –
WILLY. – Le désespoir se lit désormais sur lui. – Howard, en 1928, l’année où Al Smith était candidat à la présidentielle, votre père est venu me voir pour –
HOWARD s’apprête à partir. – J’ai des gens à voir, mon petit.
WILLY l’arrête. – Je parle de votre père ! Des promesses ont été faites par-dessus ce même bureau ! Ne me dites pas que vous avez des gens à voir – j’ai mis 34 ans de ma vie dans cette entreprise, Howard, et maintenant, je n’arrive même pas à payer mon assurance ! On ne peut pas manger l’orange et en jeter la peau – un homme n’est pas un fruit ! [Après un temps.] Maintenant écoutez-moi bien. Votre père – en 1928 j’avais fait une grosse année. J’avais gagné 170 dollars de commissions en moyenne par semaine.
HOWARD perd patience. – Écoutez, Willy, vous n’avez jamais fait une moyenne de –
WILLY frappe le bureau de sa main.  – J’ai fait une moyenne de 170 dollars par semaine en 1928 !
          Et votre père est venu me voir – ou  plutôt, j’étais dans le bureau, ici – c’était par-dessus ce même bureau – et il  a mis sa main sur mon épaule –
HOWARD se lève. – Vous  m’excuserez, Willy, j’ai des gens à voir. Ressaisissez-vous. [En sortant]
          Je serai de retour dans peu de temps.  [La lumière sur sa chaise devient très vive et étrange].
WILLY. – Me ressaisir ! Mais attends, qu’est-ce que je lui ai dit ? Mince, mais j’étais en train de lui hurler dessus ! Comment ai-je pu ? […]. Frank, Frank, tu ne te souviens pas de ce que tu m’as dit, ce jour-là ? Comme tu as mis ta main sur mon épaule, et... [Il s’appuie sur le bureau et pendant qu’il prononce le nom de l’homme mort, il met en marche accidentellement l’enregistreur…]
ENTRETIEN AVEC PHILIPPE BARONNET - EXTRAITS
          Marie-Cécile  Ouakil : Depuis plusieurs années, tu affirmes le désir de monter des textes d’auteurs  contemporains, à qui tu passes commande d’écriture : Jalie Barcilon, Jean-Marie  Clairambault, Gaëlle Hausermann, Magali Mougel, Métie Navajo, Romain Nicolas. Aujourd’hui,  pourquoi choisir cette pièce « monument » d’Arthur Miller, jouée depuis 1949 dans  de nombreux pays ? 
            Philippe Baronnet : En réalité, j’alterne le travail sur des  auteurs du XXème siècle et l’exercice de la commande d’écriture. C’est  stimulant de dialoguer avec des auteurs d’aujourd’hui, de chercher ensemble  quelles thématiques actuelles, brûlantes, nous allons traiter, mais c’est tout  aussi passionnant pour moi de se plonger dans les œuvres de Bruckner, Koltès,  Duras ou Miller aujourd’hui, de prendre le pouls de leur époque et découvrir  quelles en sont les résonances aujourd’hui. Il est vrai que cette pièce, qui a  valu à Miller un Pulitzer, est l’une des plus jouées depuis sa création, aussi  bien aux États-Unis que dans le reste du monde. Elle a obtenu de nombreux prix littéraires  et fait l’objet d’adaptations cinématographiques… Mais pour être franc, à  l’origine du projet, il y avait deux choses : le désir, après La Musica deuxième [Duras], de retrouver Vincent Garanger au plateau pour lui proposer le rôle  magnifique de Willy Loman ; et la lumière formidable qui se dégage de ce drame.  Malgré les épreuves que les personnages traversent, ces « gens de peu »  possèdent une force exceptionnelle : ils sont infiniment bons. Miller capte ces  figures avec tendresse et précision, sans jamais tomber dans la caricature. On  est forcément touché par ce père dont la maladresse est à la hauteur de l’amour  qu’il porte à ses enfants. […]  
M.-C.  O. : Le titre de la pièce focalise l’attention sur Willy Loman mais l’histoire  n’est pas uniquement centrée sur le destin tragique de son antihéros. Dans ce portrait  de famille, chacun a sa partition à jouer, l’auteur faisant intervenir plus  d’une dizaine de personnages… Comment envisages-tu la distribution ? 
          P. B. : Selon moi, l’aspect mental de cette œuvre – comme le dit  Miller, nous sommes dans la tête de Willy – permet de s’amuser avec la distribution.  C’est pourquoi dans la mise en scène que j’imagine, excepté Willy, les acteurs  pourront prendre en charge plusieurs rôles. Selon moi, cette redistribution  amplifie la sensation de confusion dans laquelle se trouve le protagoniste,  perdu entre souvenirs, fantasmes et réalité. Elle fait aussi apparaître avec  force la récurrence de certains motifs présents dans la pièce, ou même de  certaines expressions que quelques personnages ont en partage. Ainsi, le même  acteur jouera Ben (l’oncle qui représente le passé sur un ton mélancolique),  mais aussi Howard (le patron qui symbolise la violence du présent) et enfin  Bernard (le fils du voisin qui amène une touche plus comique). Dans des  registres très différents, ces trois personnages renvoient tous Willy à un  profond sentiment d’échec. En les faisant incarner par le même acteur, je  souhaite plonger le public dans l’amertume de Willy : pour lui, la réussite n’a  qu’un seul visage. Il y a là une violence symbolique très forte.  
M.-C.  O. : Face à Willy, Linda incarne la double figure de la mère et de l’épouse  dévouée, débordante d’amour, de patience et de compréhension. Est-ce  qu’aujourd’hui, elle n’offre pas de la femme une représentation dépassée ? 
          P. B. : Evidemment ! Les temps ont changé depuis les années 50…  Son altruisme touche au sacrifice car on peut imaginer aisément qu’elle aussi avait  des rêves, pour elle et pour ses deux fils – pourtant, ils ne sont jamais exprimés.  Bien que très présent, le personnage reste exclusivement tourné vers les  autres, en empathie permanente. Il est représentatif de la femme d’une certaine  époque, qui est passée au second plan, au détriment de sa propre vie. Mais je  ne vois pas en elle un personnage secondaire ni une victime. Linda est prête à  tout pour soutenir Willy, jusqu’au bout, et veut à tout prix éviter la crise,  puis le dénouement tragique. C’est elle qui tient la famille ensemble. Je la  trouve très forte, elle est capable d’un grand courage quand elle affronte ses  fils. Contrairement aux hommes de la pièce, elle ne se paie pas de mots et  regarde la vérité en face. N’oublions pas que l’auteur choisit de conclure  l’histoire sur Linda seule en scène, comme pour nous inviter à nous pencher sur  le sort de ce personnage tendre et généreux, veuve qui retient ses larmes.  
M.-C.  O. : Depuis la création des Échappés vifs, tu donnes à l'adolescence une place centrale  dans ton travail et le choix de tes projets. Est-ce qu’aujourd’hui, à travers Mort  d’un commis voyageur, tu souhaites t’adresser à la jeunesse ? Est-ce que tu  reconnais dans la pièce des archétypes d’une jeunesse universelle ?
          P. B. : Oui, et on pourrait même aller jusqu’à dire d’une  jeunesse contemporaine ! Lorsque le jeune Biff se rebelle enfin face à son père  et au modèle qu’il représente – la vie urbaine, le capitalisme, l’impératif de réussite  sociale –, il lui oppose les vertus de l’authenticité, de la simplicité et de  la nature. On pense directement aux jeunes d’aujourd’hui qui semblent inviter  leurs parents à changer leurs valeurs, à se reconnecter à une forme de  décroissance, à l’écologie, aux besoins essentiels.   D’ailleurs, au début de la pièce, il est  fait mention des arbres, des fleurs et des légumes qui ne poussent plus, comme  une façon pour Miller de parler, déjà, d’un des malaises de la grande ville  asphyxiée, et d’un appel à un retour aux sources. Plus rien ne pousse dans le  potager de la petite maison des Loman, désormais entourée de buildings qui lui  font de l’ombre. Cette critique du capitalisme et de la consommation éperdue  trouve un écho immense chez les jeunes aujourd’hui.   En outre, la pièce offre une multitude de  visages possibles de la jeunesse. Ainsi, Biff est l’idéaliste, écorché vif, en  quête du sens de sa vie ; à l’inverse, son frère Happy pense à court terme, à  la recherche d’un plaisir égoïste et immédiat, collectionneur de filles et de  mensonges qu’il accumule pour s’en tirer tant bien que mal ; Bernard, lui, est  l’exemple même de la méritocratie, qui a compris le système et trace sa route  vers la réussite sociale – fils des voisins ayant reçu une éducation similaire  à celle des Loman, sa brillante réussite ne fait que renvoyer Willy à l’échec  scolaire de ses enfants – ; Howard, jeune patron qui hérite de la société de  son père, offre le visage glaçant du pouvoir, dépourvu d’empathie ; et puis il  y a Stanley, le serveur dont on devine qu’il restera serveur toute sa vie et  qui semble venir rappeler aux enfants Loman que même au fond du trou, on trouve  toujours plus malheureux que soi… Pour moi, tous ces archétypes trouvent des résonances  dans la jeunesse actuelle, dans ses contradictions et dans ses aspirations. Je  pense qu'elle pourra se reconnaître dans tel ou tel personnage – bien qu'ils  soient tous masculins !   
M.-C.  O. : On l’a dit, la pièce semble visionnaire tant elle résonne avec notre  actualité socioéconomique et la période de crise dans laquelle l’Europe se  trouve aujourd’hui… Jusqu’où souhaites-tu souligner cet aspect ? 
          P. B. : Oui, le texte nous renvoie très directement à une réalité  presque banale aujourd’hui ! À travers le destin de ce voyageur de commerce renvoyé  par son employeur, c’est l’ultralibéralisme occidental dont nous parle Miller.  Est-ce une raison pour appuyer ce parallélisme en modernisant à tout prix la  pièce et ses composantes ? Je ne crois pas. De façon générale, je ne suis pas  vraiment adepte de la transposition des œuvres… Willy Loman est commis voyageur  – une profession qui n’existe plus aujourd’hui – et son outil de travail n’est  pas un ordinateur portable mais une Studebaker. On pourrait s’amuser à  transposer et se demander « qui serait Willy Loman aujourd’hui ? » mais pour  moi, il est plus essentiel de se concentrer sur ce qui est véritablement fort,  et pour le coup intemporel : ce que vivent les personnages. Lorsque Willy  défend avec ses tripes tout ce qu’il a donné à cette entreprise, lorsqu’il joue  sa vie pour prouver qu’il est encore un bon employé et qu’en retour son patron  lui renvoie un profond mépris, lui annonce son licenciement et lui demande de rapporter  ses dernières marchandises, je pense tout naturellement à la réforme des  retraites, aux gilets jaunes, à la froideur du monde de la finance – et je fais  confiance aux spectateurs pour y penser également. C’est d’ailleurs tout le sel  de notre art : laisser les choses apparaître sans jamais en faire la  démonstration. Donc pour répondre à ta question, j’essaierai surtout de ne rien  souligner, de faire confiance à Arthur Miller et aux acteurs. […]  
M.-C.  O. : La pièce fait intervenir les personnages dans les fantasmes et les souvenirs  du commis voyageur. Cette façon de raconter, très novatrice à l’époque où  Miller écrit sa pièce, crée un enchevêtrement du passé et du présent, de  l'imaginaire et du réel. Comment penses-tu orchestrer cette fluidité narrative  ? 
          P. B. : Comme Willy est à la fois un personnage mélancolique  tourné vers le passé, un vieil homme sujet à la confusion mentale et un  affabulateur professionnel, sa machine cérébrale est particulièrement complexe  : tantôt il convoque délibérément ses souvenirs, tantôt il est envahi par une  mémoire qu'il ne contrôle pas, tantôt il livre du passé une version déformée.  L'auteur n'explicite pas le statut de chaque séquence, son degré de réalité ou  de vérité. Les transitions entre passé et présent n'ont donc pas à être forcément  fluides ou imperceptibles... Outre les glissements, il peut aussi s'agir de  collisions brutales. D'autres fois encore, au gré du trouble de Willy, les  scènes et les époques se chevauchent dans une polyphonie chaotique, comme  lorsque Willy entend le rire lointain de son ancienne maîtresse alors qu'il est  en pleine conversation avec sa femme. Dans tous les cas, il s’agit d’ouvrir le  plateau à l’univers mental du protagoniste, de se souvenir de ce que Miller  lui-même souhaitait créer : « une forme qui, en tant que forme, épouse  littéralement le processus de pensée de Willy Loman. » […] La pièce et sa  structure narrative nous parlent aussi de folie, d’une démence qui s’apparente  pour moi à la maladie d’Alzheimer – confusion, irritabilité, troubles de l’humeur  et des émotions, et bien sûr mémoire à court terme affectée, souvenirs anciens  préservés... Comme le fils autiste de Bobby Fischer… [Norén], le père  affaibli de Quai ouest [Koltès] ou encore la mère évoquée dans Sœurs [Rambert],  Willy Loman présente une forme de maladie mentale qui affecte le langage. Cette  déstructuration confère à la langue une poésie et un mystère vertigineux, que  j’aime convoquer au théâtre. Sous la profusion ou la confusion de leurs  paroles, se cache souvent une vérité. À la manière des fous et autres idiots de  la grande littérature, de Shakespeare à Dostoïevski, ils nous renvoient,  parfois cruellement, à notre platitude.  
M.-C.  O. : Sur le plateau, comment imagines-tu traiter ces bascules ? Par la lumière,  le décor ? Astu déjà travaillé à la scénographie du spectacle ? 
          P. B. : Comme toujours dans mon travail, la scénographie  s'inventera au fil des répétitions, de sorte que l'espace ne soit pas imposé  aux acteurs mais se dessine progressivement, en lien avec la dramaturgie et  l'organicité du jeu. Je ne crois pas à un espace réaliste et pour moi, il est  inutile de reconstituer la maison, le jardin, le bureau… Ce qui importe, c'est  de trouver les éléments essentiels à ressentir : la chaleur d'une cuisine, l'austérité  d'un bureau, l'intimité d'une chambre ou encore l'ombre écrasante des  buildings. Il ne s'agit pas de représenter les lieux mais d'en donner la  sensation physique. Pour ce qui est des bascules, je compte beaucoup sur le  travail très riche du son et de la musique. Au fil de mes collaborations avec  Julien Lafosse, je redécouvre sans cesse avec enthousiasme les apports incroyables  de la création sonore : au-delà de la dimension émotionnelle qu’elle apporte  indéniablement, c’est surtout un formidable outil pour caractériser un  personnage, éclaircir des situations, créer des espaces et des ellipses, et  souligner une dramaturgie. Le son apparaît et disparaît, il s’évapore, aussi  furtif et insaisissable que les souvenirs de Willy. De ce point de vue, il me semble  être un partenaire essentiel, que je ferai intervenir dès les premières  répétitions. […]  
M.-C.  O. : Malgré cette langueur, l’auteur réserve des moments joyeux… Es-tu sensible  à cet humour teinté de mélancolie ?
          P. B. : Pour moi, l’humour n’est pas teinté de mélancolie. Dans  la pièce, les séquences les plus drôles sont issues des souvenirs de Willy et  ce sont avant tout des moments de joie et de grande vitalité. C’est à travers  le montage de ces scènes passées avec celles du présent – plus froid, dur et amer  – qu’apparaît la mélancolie. Ce sentiment si difficile à saisir est donc le  résultat des contrastes entre les époques et les niveaux de réalité. Pour en  revenir à l’humour, il est essentiel, et c’est pour moi l’un des enjeux majeurs  du travail sur la pièce : comment réussir ces scènes de joie et de rires issues  de la mémoire de Willy ? Comment traiter le bonheur au théâtre sans tomber dans  l’ennui ? Je me méfie beaucoup de la caricature et de la mièvrerie dans  laquelle nous pourrions faire sombrer les personnages durant ces moments  légers, qui semblent ne donner qu’une vision angélique voire fantasmée de la  famille, sans grands enjeux dramatiques. Mais à y regarder de plus près – et  c’est là le génie d’Arthur Miller –, c’est précisément la question de  l’authenticité de ces instants qui est posée dans la pièce : est-ce vraiment ce  qui s’est passé ou la mémoire cherche-t-elle à embellir le souvenir ? Nous  pourrions être dupés, comme les enfants Loman… A tout moment, l’auteur semble  dire aux spectateurs : méfiez-vous, nous sommes dans la tête de Willy et qui  sait ce qui est encore vrai au plus profond de cet homme ! 
PREFACE D’ARTHUR  MILLER
          On a beaucoup parlé et écrit sur la  signification de Mort d’un commis voyageur, autant d’un point de vue  psychologique que d’un point de vue sociopolitique (…) Ce qui a paru proprement  incroyable à bien des gens, c’est que je n’ai jamais été moi-même vendeur de  quoi que ce soit. J’ai vite renoncé à m’expliquer là-dessus. Et lorsqu'on me  demandait ce que Willy vendait, ce qu'il y avait dans ses valises, je ne  pouvais que répondre : « Lui-même. » 
Je ne voulais condamner aucune profession et je dois avouer que lorsque j’ai écrit la pièce, j’ignorais à peu près toutes les oeuvres de Freud. Je n'avais pas l'intention de démolir l'édifice américain, ni d'exalter les sentiments familiaux, ni de guérir les maux qui affligent parfois les familles. La vérité, en tout cas, la vérité de mon dessein – et ceci je puis l'affirmer – est bien plus simple et plus complète à la fois. La pièce est née d'images simples.
D'une petite maison, dans une petite rue tranquille, qui résonnait autrefois du bruit de jeunes garçons, puis qui devint silencieuse, et fut occupée par des étrangers. Étrangers qui ne pourraient jamais savoir avec quelle joie de conquistadors Willy et ses fils avaient jadis réparé le toit. Maintenant la maison est tranquille, avec de nouveaux venus dans les lits.
L'image du vieillissement et de la mort de vos amis, et des étrangers à la place des puissants, qui ne vous connaissent pas, ni vos succès ni votre incroyable valeur.
L'image d'un regard dur et accusateur  qu'un fils lance sur vous, devenu d'un seul coup lucide, libéré de votre mythe,  qui s'est à jamais séparé de vous, qui ne veut plus savoir que vous avez
          vécu pour lui et pleuré pour lui.        
L'image de la férocité lorsque l'amour s'est transformé en autre chose, et qu'il est là, quelque part dans la chambre, sans qu'on puisse le retrouver.
L'image de ceux qui sont devenus des étrangers, et seulement des juges les uns pour les autres.
Surtout, peut-être, l'image d'un besoin plus fort que la faim, l'amour ou la soif, le besoin de laisser son empreinte quelque part dans le monde. Un besoin d'immortalité, la certitude d'avoir soigneusement inscrit son nom sur un pain de glace par une brûlante journée d'août. (…) Et tout le long de la pièce, l'image d'un pauvre homme dans un monde étranger, un monde qui n'est ni un abri ni un vrai champ de bataille, mais seulement une galaxie de promesses toujours menacée par la chute. »
Préface d’Arthur Miller, Arthur Miller Théâtre, Éditions Robert Laffont
        Né le 17 octobre 1915 à New York, Arthur Miller est avant tout un héritier des années 30, pour qui la grande crise de 1929 est restée une cassure fondamentale. Issu d’une famille juive aisée, il assiste à l’âge de 14 ans à la ruine de l’entreprise paternelle. C’est pour le fils une entrée brusque dans le monde réel : écroulement de l’image mythique du père, fin des certitudes et de la sécurité familiale, et prise de conscience du monde économique et social. Toute l’œuvre dramatique de Miller sera imprégnée de ce premier déchirement.
Le jeune Miller est fortement influencé par les idées socialistes et fasciné par le théâtre révolutionnaire de l’époque – le "Group Theatr" et les pièces de Clifford Odets. Mais Miller ne s’orientera pas vers le théâtre didactique. Étudiant attentif et passionné d’Ibsen, il désire comme lui faire surgir les processus et les lois qui commandent aux hommes et ainsi donner un sens à l’apparente confusion du réel. Après l’université, il écrit quelques pièces radiophoniques, travaille à un film – The Story of G. I. Joe – et écrit deux pièces : L’Âge d’or [1940] et surtout L’Homme qui avait toutes les chances [1944]. Il publie aussi son seul roman, Focus [1944], qui traite de l’antisémitisme. Mais ce n’est qu’en 1947 que Miller rencontrera le succès avec Ils étaient tous mes fils, pièce sur l’après-guerre. Puis c’est Mort d’un commis voyageur [1949], qui obtient le prix Pulitzer, où s’affrontent à nouveau le père et le fils et où Miller traque les illusions destructrices engendrées par le rêve et les mythes américains. Miller est désormais perçu comme un dramaturge de gauche, ce que viendra confirmer sa pièce suivante Les Sorcières de Salem [1952]. Cette réputation d’écrivain progressiste lui vaudra d’ailleurs d’être condamné pour outrage au Congrès en 1956. Suivent ensuite Je me souviens de deux lundis et Vu du pont [1955], deux pièces situées dans le milieu ouvrier de New-York.
Durant les neuf années suivantes, marquées notamment par  son mariage avec Marilyn Monroe, Miller n’écrira plus pour le théâtre. Soucieux  d’offrir à Marylin un rôle à sa mesure, il écrit cependant le scénario du film The  Misfits [1961], centré une fois encore sur la mort de l’innocence et du  rêve américain. En 1964, deux ans après la mort de Marilyn, il reviendra sur  ces années sombres avec Après la chute. La même année, il écrit Incident  à Vichy, où il fouille les bonnes consciences et explore les liens  souterrains entre les victimes et les bourreaux nazis. Le Prix, créé en  1968, est pour beaucoup de critiques la dernière grande pièce de Miller.  Depuis, Miller, tout en restant un homme engagé, n’a pas cessé d’écrire et  d’explorer de nouvelles formes d’écriture. Citons entre autres : Le Plafond  de l’archevêque, L’Horloge américaine, Élégie pour une dame et Comme une histoire d’amour, créées ensemble en 1982. Il a également  publié une magistrale autobiographie, Au fil du temps, somme de sa  réflexion sur le théâtre et l’histoire contemporaine américaine. 
          
Source : Gérard Dallez, Le Nouveau dictionnaire des auteurs, Édition Robert Laffont.

Kelly  Rivière - traductrice 
          Comédienne, traductrice, autrice et metteuse en scène d’origine  franco-irlandaise, Kelly Rivière se forme en danses classique et contemporaine  au Conservatoire régional de Lyon, puis au cours Florent. Membre du comité  anglais de la Maison Antoine Vitez depuis 2005, elle traduit seule ou en  collaboration les oeuvres de dramaturges anglophones : Laura Wade, Samantha  Ellis, Gary Owen, debbie tucker green, Mike Bartlett, et plus récemment Arthur  Miller. Ses traductions, très souvent mises en scène, sont toutes publiées chez  Actes-Sud Papiers, aux Éditions Théâtrales ou Koinè. Au plateau, elle travaille  sous la direction de Sarah Siré, Jalie Barcilon, Guy Freixe, Karin Serres,  Patrice Douchet, Claire Rengade, Philippe Calvario, Arnaud Cathrine, Philippe  Baronnet, Pauline Bureau, Maïa Sandoz, Emilie Rousset... À la télévision, de  Frédéric Berthe ; et au cinéma, Léa Fehner, Sages-femmes ; Iris Kaltenbäck, Le ravissement, ou encore Eric Toledano et Olivier Nakache dans Une  année difficile. Elle prête régulièrement sa voix pour des fictions  radiophoniques sur France Culture. Diplômée du D.E., elle est intervenante  pédagogique en théâtre et traduction : cours Florent, universités, La  Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon. En 2017, elle crée la compagnie Innisfree  et passe à l’écriture avec An Irish Story / Une histoire irlandaise, spectacle  bilingue sur la quête de ses origines – prix SACD Nouveau Talent Humour –,  toujours en tournée en France ou à l’étranger (Algérie, Irlande). En 2023, la  compagnie Les Échappés Vifs lui passe commande d’une nouvelle traduction de Mort  d’un commis voyageur, puis de l’écriture de Si tu t’en vas, forme  courte à destination notamment de la jeunesse, créé pour tous types d’espaces,  des théâtres aux salles de classe. 
 Philippe  Baronnet - metteur  en scène 
          Issu de la promotion 2009 de l’École nationale supérieure des arts et  techniques du théâtre, Philippe Baronnet participe, en tant que comédien, à  plusieurs spectacles de metteurs en scène renommés dans le cadre de sa  formation : Les Ennemis de Maxime Gorki mis en scène par Alain Françon, Hyppolyte/La  Troade de Robert Garnier m.e.s. par Christian Schiaretti, Cymbeline de  William Shakespeare m.e.s. par Bernard Sobel... Parmi ses différents travaux  d’école, il participe aux créations de Philippe Delaigue, Les Sincères de  Marivaux et Démons de Lars Norén. En 2010, il devient comédien permanent  du Théâtre de Sartrouville et participe, jusque 2013, aux créations de Laurent  Fréchuret : Embrassons-nous, Folleville ! d’Eugène Labiche, La  Pyramide de Copi, L’Opéra de quat’sous de Bertolt Brecht et Kurt  Weill. Dans le cadre de la 8ème biennale Odyssées en Yvelines, il joue De la  salive comme oxygène, texte commandé à l’auteure Pauline Sales et m.e.s. par  Kheireddine Lardjam. La dernière année de sa permanence artistique à  Sartrouville, il dirige la mise en espace de Lune jaune de David Greig,  puis se voit confier l’ouverture de la saison 12/13 : il choisit de mettre en  scène Bobby Fischer vit à Pasadena de Lars Norén. Jusque 2019, il  travaille régulièrement au Préau CDN de Normandie – Vire où, après avoir repris  un rôle dans Les Arrangements de P. Sales m.e.s. par L. Hemleb, il  dirige des résidences dans les collèges et lycées partenaires et créé Le Monstre  du couloir de David Greig pour le festival ADO, en 2014. La création de sa  compagnie avec Jérôme Broggini est la suite naturelle à ces rencontres et  nouvelles amitiés artistiques. Aujourd’hui implantée à Sourdeval, la compagnie  Les Échappés vifs est associée jusqu’en 2018 au Préau CDN de Vire. Maladie  de la jeunesse de Ferdinand Bruckner, La Musica deuxième de Marguerite  Duras, Quai ouest de Bernard-Marie Koltès ou We just wanted you to  love us de Magali Mougel comptent parmi les spectacles créés depuis. Titulaire  du D.E. d’enseignement théâtral, Philippe Baronnet anime divers ateliers de  pratique artistique dans le secondaire ou le supérieur : Université de Caen,  CFA… 

Vincent Garanger -  comédien 
          Vincent Garanger a suivi les formations du Conservatoire municipal  d’Angers, de l’ENSATT et du CNSAD de Paris avec comme professeurs Michel  Bouquet, Gérard Desarthe, Michel Bernardy, Mario Gonzalès. Au théâtre, il a  joué sous la direction de Jean-Claude Drouot, de Marguerite Duras (création d’Agatha),  Louis Calaferte, Roger Planchon, Alain Françon, Jacques Lassalle, Christophe  Perton, Philippe Delaigue, Guillaume Lévêque… Comédien permanent pendant six  ans au CDN de Valence, il y a joué des textes de Pauline Sales, Annie Zadek,  Lars Norén, Christophe Perton, Anne Bisang… Il a mis en scène Bluff d’Enzo  Cormann avec Caroline Gonce et Guy Pierre Couleau, Trahisons d’Harold  Pinter et La Campagne de Martin Crimp en diptyque. De 2009 à 2018, il  dirige avec Pauline Sales Le Préau de Normandie–Vire, et joue dans les  productions du CDN : à l’ombre de Pauline Sales m.e.s. par P. Delaigue, J’ai  la femme dans le sang d’après les farces conjugales de Georges Feydeau  m.e.s. par R. Brunel. Occupe-toi du bébé de Dennis Kelly m.e.s. par O. Werner, Les Arrangements de Pauline Sales m.e.s. par L. Hemleb, Quand j’étais  Charles de et m.e.s. par F. Melquiot, Les Travaux et les jours de  Michel Vinaver m.e.s. par G. Lévêque, Docteur Camiski ou l’esprit du sexe de  Fabrice Melquiot et Pauline Sales m.e.s. par Y. Beaunesne, J. Bert, R. Brunel,  P. Bureau, G.- P. Couleau, F. Melquiot, A. Meunier et P. Sales. Et dans les  coproductions : La Mouette d’A. Tchekhov m.e.s. par A. Nauzyciel et La  Musica deuxième de Marguerite Duras m.e.s. par P. Baronnet. Depuis 2019, il  joue dans Les Femmes de la Maison de et mis en scène par P. Sales, Lazzi de et mis en scène par F. Melquiot ou Welfare sous la direction de  Julie Deliquet. Il met en scène Mon Visage d’Insomnie de Samuel Gallet  et il interprète le commissaire Dumont dans la série Lupin d’Omar Sy. En  24/25, il sera dans les créations : Article 353 du code pénal de Tanguy  Viel m.e.s. par Emmanuel Noblet, ainsi que dans Mort d’un commis voyageur d’Arthur  Miller m.e.s. par Philippe Baronnet. 
  Anne  Cressent - comédienne 
          Diplômée du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, après avoir  suivi les cours des conservatoires du Ier et XIe arr. et intégré l'ESAD de  Paris, ses professeurs sont D. Mesguich, C. Hiegel, A. Françon, C Marcadé, L. Hemleb  et H. Vincent. Elle travaille à sa sortie avec D.Mesguich dans Esther et Dom  Juan, puis avec L.Laffargue Paradise codes inconnus 1, La Grande Magie,  Casteljaloux, Ph. Adrien Yvonne Princesse de Bourgogne, S. Tranvouez L’élégant profil d’une Bugatti sous la lune, P. Desveaux Maintenant  ils peuvent venir, Pearl, Lulu, B. Lavigne Adultères, Grand Ecart,  Y. Pignot Le Vol de Kitty Hawk, E. Chailloux L’Illusion comique, Mademoiselle  Julie, ou L. Hemleb qui lui fait rencontrer et découvrir l’écriture de  Pauline Sales Les Arrangements, puis Docteur Camiski ou l’esprit du  sexe co-écrit avec F. Melquiot et m.e.s. par Pauline Bureau, Les Femmes  de la maison de et mes par Pauline Sales. Elle travaille également avec S Lecarpentier,  L. Brethome, T. Condemine et Julie Timmerman avec qui elle défend un théâtre  engagé, avec les pièces de l’autrice, metteuse en scène : Un démocrate,  Bananas and Kings et enfin Zoé. Régulièrement depuis 2019, Anne joue  dans Bigre de Pierre Guillois. Au cinéma, ou à la télévision elle  travaille avec plusieurs réalisateurs dans la série Boulevard du Palais, mais aussi  avec Jean Xavier De Lestrade, Bruno Chiche, Patrice Chéreau. 
 Marc  Lamigeon - comédien 
          Marc Lamigeon suit plusieurs cours d’art dramatique (Studio Pygmalion,  cours Florent, conservatoire du Centre et de Paris XIe) ; et intègre l’ENSATT  en 2004. Au sein de cette école, il joue dans plusieurs spectacles tels que Un  Légume de F.S. Fitzgerald, m.e.s. par Ph. Delaigue, Nouvelles du Plateau d’O. Hirata, m.e.s. par O. Maurin ou encore Ou le monde me tue ou je tue  le monde de la 1ère promotion d’écriture d’art dramatique de l’école m.e.s.  par G. Delaveau et S. Delétang. Il est ensuite engagé par Ch. Schiaretti pour  jouer dans Les Visionnaires de J.D.-de St-Sorlin au TNP à Lyon, puis par  O. Maurin pour Descouteaux dans les poules de D. Harrower. Il travaille  avec M.Léris, A. Sachs, M. Poésy... et plus récemment P. Baronnet (Quai  ouest) ou C. Benedetti. Marc Lamigeon travaille également pour la  télévision (Paris enquêtes criminelles réal. D. Tabuteau, Voyage au  bout de la nuit, Direct 8), le cinéma (Un coup réalisé par C.  Gouteix) et pour la radio (pièces réalisées par M. Meerson pour France  Culture).
  Félix  Kysyl - comédien 
          Passé par la classe libre du cours Florent, Félix Kysyl intègre le  conservatoire national supérieur d’art dramatique en 2012, et travaille avec  Jean-Damien Barbin, Michel Fau, Yann-Joël Collin, Anne Alvaro, Thierry  Thieu-Niang, Gilles David, David Lescot et Patrick Pineau. Au théâtre, il  travaille sous la direction de Richard Brunel dans J’ai la femme dans le  sang d’après Feydeau, Lukas Hemleb dans Les Arrangements de Pauline  Sales, Guy-Pierre Couleau et Arnaud Meunier dans le feuilleton théâtral Docteur  Camiski ou l’esprit du sexe de Pauline Sales et Fabrice Melquiot. Félix  Kysyl fait également parti du collectif Damaetas, et il interprète Petrell dans  la mise en scène de Maladie de la jeunesse par Philippe Baronnet. Au  cinéma et à la télévision, il travaille avec Philippe Faucon, Roschdy Zem,  Stéphanie Murat, Jean-Xavier de Lestrade, Antoine Cuevas et dernièrement Alain  Guiraudie. 
 Samuel  Churin - comédien 
        Formé à l’Ecole du Passage de Niels Arestrup, il fait ses débuts au théâtre  dans Minna Von Barnhelm de Gotthold E. Lessing et L’oeuvre du pitre  de Guillois m.e.s. par Pierre Guillois. Puis il joue de nombreuses  créations d’Olivier Py, dont La Panoplie du squelette, Le Jeu du veuf (cycle  de La Servante), L’Apocalypse joyeuse, Epître aux jeunes acteurs, Le Visage  d’Orphée et L’Enigme Vilar dans la Cour d’honneur du Festival  d’Avignon, La Jeune Fille, le Diable et le Moulin, L’Eau de la vie, La Vraie  fiancée (3 contes de Grimm), Nous les héros de Jean-Luc Lagarce. Il  joue Un chapeau de paille d’Italie de Labiche et Le Génie des bois écrit  et m.e.s. par Olivier Balazuc ; Nathan le sage de Lessing, Folies  coloniales et Le Contraire de l’amour de Mouloud Feraoun, m.e.s. par  Dominique Lurcel ; J’ai (textes sur le rugby) m.e.s. par Guillaume  Rannou ; Le Vertige des animaux avant l’abattage de Dimitri Dimitriadis,  m.e.s. par Caterina Gozzi ; Océan mer de Baricco et Monsieur Chasse de  Feydeau, m.e.s. par Robert Sandoz ; Norma Jean adapté et m.e.s. par John  Arnold. Pendant six ans, il dirige des stages avec le CDN d’Orléans, enregistre  de nombreuses pièces pour Radio France, notamment sous la direction de Claude Guerre  et Christine Bernard Sugy. Au cinéma, il est l’interprète principal dans Les  Yeux fermés réalisé par Olivier Py, et on l’a vu depuis dans 120 Battements  par minute de Robin Campillo ou Reprise en main de Gilles Perret. 
LES ÉCHAPPÉS VIFS
          Après ses années de permanence  artistique au Théâtre de Sartrouville–CDN, Philippe Baronnet, comédien, metteur  en scène, crée Bobby Fischer vit à Pasadena dont il confie le rôle  principal à sa partenaire de jeu, Nine de Montal. Avec Jérôme Broggini, ils  fondent tous les trois la compagnie Les Permanents, aujourd’hui Les Échappés  vifs. Attaché à l’idée de placer l’acteur au centre de la création théâtrale,  Philippe Baronnet s’intéresse aux écritures contemporaines – Sylvain Levey, Dea  Loher, Marius von Mayenburg… –, porte plus particulièrement son regard sur  l’adolescence et ses enjeux – voir Le Monstre du couloir de D. Greig ou  plus récemment We just wanted you to love us de M. Mougel –. Il soutient  et accompagne les dramaturgies d’aujourd’hui par le biais d’actions  artistiques, ou de commandes d’écriture : Jalie Barcilon, Jean-Marie  Clairambault, Kelly Rivière. 
À travers le choix des pièces, la jeunesse et plus largement les rapports familiaux sont des thématiques récurrentes pour Les Échappés vifs. Passionnés par la pédagogie et soucieux de porter l’art dramatique également hors des salles traditionnelles, les artistes et techniciens réunis au fil des spectacles défendent un théâtre sensible et psychologique qui interroge, bouscule et invite le spectateur à se pencher sur les détails. Toutes les équipes s’investissent dans, tout comme en dehors des théâtres, pour proposer une expérience dramatique en dehors des lieux habituels.
Associée jusque 2018 au Préau CDN de Vire Normandie, la compagnie Les Échappés vifs a pu affirmer son désir de partager avec les publics, le plus en amont possible, les oeuvres portées au plateau – dans le cadre de résidences dans les établissements scolaires du bocage normand, notamment. Ainsi la compagnie a-t-elle présenté des formes pour grands plateaux – Maladie de la jeunesse de Bruckner, Quai ouest de Koltès– comme des spectacles à la scénographie plus mobiles – Soeurs de Rambert, La Musica deuxième de Duras… — afin de porter haut la parole des auteurs, des autrices, défendue dans un grand élan de sincérité partagé.
Tout, lumières subtiles, décors glissés, touches musicales, est au service du texte [...] magnifiquement [mis en scène et incarné par des] comédiens au diapason. Jean-Luc Porquet – Le Canard enchainé
Dans une nouvelle traduction simple et fluide menée par Kelly Rivière, Philippe Baronnet [...] donne à voir la tragédie ordinaire de nos déterminismes, en même temps que nos puissants liens d’amour et désirs de liberté. Éric Demey – sceneweb.fr