DANSE | DÈS 12 ANS
Chorégraphie Jean-Claude Gallotta 
	        Groupe Émile Dubois
Repris, revisité et réécrit, Ulysse poursuit son épopée et confirme toute sa modernité quarante ans après sa création.
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Plus de 40 ans après la première représentation d’Ulysse, Jean-Claude Gallotta propose une reprise de sa pièce emblématique au plus près de l’esprit originel, nourrie de l’énergie des danseurs d’aujourd’hui. Une chorégraphie intemporelle, d’une précision redoutable qui, dans un tourbillon de gestes, nous donne à voir toute la richesse de la nouvelle danse. 
            Les interprètes nous emportent dans une odyssée chorégraphique avec appétit, fougue et amour de la danse. Ils se jettent à l’assaut de l’espace, multiplient les portés, les arabesques… Sur la musique originale de Serge Houppin et Henry Torgue, Gallotta déploie son abstraction ludique et son humour pour nous offrir une ode à la liberté du corps en mouvement, au voyage et à la quête. Une page jouissive de l’histoire de la danse dont la beauté des tableaux ne manquera pas de vous éblouir !
 Rencontre Avec Jean-Claude Gallotta
 Mercredi 15 mars | 19h Auditorium du CRD Camille Saint-Saëns
La sélection bibliographique proposée par la librairie-café de Dieppe La Grande Ourse
Chorégraphie Jean-Claude Gallotta. Assistante à la chorégraphie Mathilde Altaraz. Dramaturgie Claude-Henri Buffard. Reconstruction et transmission Mathilde Altaraz et Thierry Verger. Avec Axelle André, Naïs Arlaud, Alice Botelho, Ibrahim Guetissi, Fuxi Li, Bernardita Moya Alcalde, Clara Protar, Jérémy Silvetti, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger. Musique originale Henry Torgue et Serge Houppin. Lumières et scénographie Manuel Bernard. Assistant lumières Benjamin Croizy. Costumes Chiraz Sedouga.
© Photo : Guy Delahaye
Production : Groupe Émile Dubois / Cie Jean-Claude Gallotta. Coprods : Le Volcan – SN du Havre, Théâtre-Sénart – SN de Lieusaint. Soutiens : MC2 : Grenoble, Théâtre de l’Arsenal de Val-de-Reuil – SCIN art et création pour la danse. Remerciements : Yvesmarie Despails et l’Hexagone SN Arts Sciences / Atelier Arts Sciences.
Pour qu’une pièce de répertoire soit reprise et remontée, il faut toujours un désir partagé, une conviction, un élan.  C’est lors d’une  rencontre avec Jean-François Driant, directeur du Volcan, Scène nationale du Havre que le projet  de reprendre Ulysse, pièce fondatrice de 1981, s’est  formé.
          Souvent interrogé sur ces pièces  qui ont contribué à faire exister  en France la danse  contemporaine et auxquelles il est fait depuis régulièrement référence, Jean-François Driant  a eu l’idée d’en parler à Jean-Claude Gallotta.
          Proposition opportune pour ce dernier  puisqu’il s’est lui-même  donné pour mission  depuis de nombreuses années d’alterner créations et pièces de répertoire. Son Ulysse a connu plusieurs  versions en près de quarante  ans dont les célèbres Variations d’Ulysse que le chorégraphe a présentées à l’Opéra de Paris en 1995.
Pour fêter les 40 ans de cette chorégraphie ainsi que les 60 ans de la Maison de la culture du Havre, Jean- Claude Gallotta proposera une reprise d’Ulysse, avec l’énergie des danseurs d’aujourd’hui, au plus près de l’esprit  de la version originelle. 
          
C.-H.B.
Avec Ulysse, j’ai  voulu rendre hommage  à la chorégraphie, raconter de manière ludique l’architecture  de l’espace. 
          Je  n’ai pas voulu théoriser sur la danse mais plutôt  jouer avec certaines situations du ballet moderne  et classique en les truffant de détails et  de mouvements personnels.
          J’ai par exemple utilisé  et parfois tordu  le cou à la symétrie, à la perspective, aux entrées et aux sorties,  aux pas d’ensemble, aux enchaînements  entre le groupe et les solistes, aux duos, aux portés dédoublés, aux comptes, aux quatuors, à la multiplicité des centres, aux marches, aux arabesques, etc...  Se sont rajoutés  de manière naturelle,  le côté sensuel  et charnel des danseurs et quelques «fêlures» qui annoncent ou rappellent d’autres  chorégraphies plus  tourmentées.
          Une fois la pièce  construite il fallait  lui donner un titre. Je décidais de l’intituler : Ulysse, car la complexité de la chorégraphie m’empêchait en tant que danseur  de la pénétrer facilement. Comme  le héros d’Homère  j’y voyais là mon  propre exil et l’impossibilité d’atteindre mes propres rivages  chorégraphiques.
          La musique  océane d’Henry Torgue et Serge Houppin, le blanc rêvé des costumes  m’influencèrent dans ce choix.
          Avec ce  titre, il était intéressant de voir apparaître toutes les correspondances qui  pouvaient naître entre Homère, Joyce et la chorégraphie.
          Je vous invite à partager ces correspondances,  à éveiller le «soursik» qui sommeille en vous, et raviver nos rêves enfouis.
          
Jean-Claude Gallotta
Ulysse, 40 ans après...  Cet Ulysse appartient à l’histoire chorégraphique, il est considéré   comme l’une des pierres  angulaires de la nouvelle danse française. Quel était le contexte  à la création en 1981 ? 
          Au départ, je voulais faire un « event », à la manière de Merce Cunningham. Une continuité faite de « bouts » chorégraphiques déjà existants. Mais au-delà de la performance, je voulais voir si je pouvais maitriser  une chorégraphie dans la durée, faire un event qui serait une œuvre entière.  Un ballet, un vrai. Un ballet purement  chorégraphique, sans livret,  sans « théâtre », guidé par le seul mouvement.
          Si cette pièce est devenue emblématique, c’est sans  doute qu’elle est arrivée au bon moment.  Peut-être, à cette époque, était-on lassé du néo-classique. En se rangeant sous la bannière « ballet », en proposant une  forme longue de l’event, Ulysse a  pu être perçu comme un des actes  fondateurs ouvrant une nouvelle période chorégraphique.
Tu  parles alors de « ballet blanc »...
          Oui, lorsque j’ai débuté, j’ai voulu « faire comme  », j’ai souscrit  à cette idée que tout chorégraphe devait  faire son ballet  blanc, un peu à la manière de la plupart  des compositeurs qui se sont essayés à la forme  du Requiem. Le ballet « pur », céleste, immaculé,  fasciné par l’idée  de perfection, un ballet du mouvement pur. C’est ce que j’ai fait, à ma manière, Ulysse est un ballet  blanc, mais mâtiné  de Buster Keaton... !
Ulysse est l’œuvre à laquelle tu es revenu  le plus souvent,  tu as dit pourtant un jour que ce  n’était pas ton œuvre préférée...
          Pendant longtemps, j’ai pensé que cette pièce était trop classique. Je ne  le dirais plus aujourd’hui. À force de la reprendre  au cours des années j’ai vu au contraire que tout en restant  la même elle pouvait changer  de nature, qu’elle  était plus malléable  qu’il n’y paraissait, qu’elle contenait une modernité, qu’en la déclinant  ainsi je pouvais  la faire jouer avec chacune des  époques qu’elle traversait.
En 2007, la reprise portait le nom de Cher Ulysse, la musique n’était plus la même, les  pendrillons du décor étaient « affalés » comme les voiles d’un bateau... tu proposais un  Ulysse qui cherchait à refléter une époque moins resplendissante que celle des années  80...
Oui, avec cette version de 2007 j’ai voulu en effet  interroger ce moment de l’Histoire, le début  du XXIème siècle, que nous traversions. En 2021, je souhaite positionner le  spectacle autrement ; montrer davantage un  art chorégraphique qui résiste aux fluctuations moroses de la société. Cet Ulysse 2021 ne se laissera  pas, ou du moins pas consciemment, colorer  par la tonalité de l’époque actuelle. Il ne la subira pas, au contraire, je  voudrais en quelque sorte qu’il  l’illumine. Ainsi, en revenant aux sources de 1980, je ne « nostalgise pas », loin de là, je réponds aux craintes, aux angoisses, à l’avenir  incertain, par une pièce violemment  vivante.
En 2021, peu de spectateurs auront pu connaître  la version originale. Est-ce que cela a  compté dans ton choix de la reprendre ?
          Je ne dirais pas que ça a compté dans mon choix, même si reprendre une pièce c’est toujours espérer connaître des spectateurs nouveaux. Non, je suis simplement content de m’y repencher. Cette pièce, maintes fois reprises, m’intéresse encore en tant que telle. Elle fait même naitre en moi aujourd’hui des envies de la prolonger. Je la pense désormais comme un premier volet d’un diptyque dont le second sera une sorte de ballet noir intitulé Pénélope.
As-tu déjà des intentions sur la façon  dont tu vas aborder le travail en répétition ?
          Je n’ai pas d’intention. Je ne veux pas en voir. J’attends d’être dans le studio de répétition. Ce sont les interprètes, avec les qualités physiques et chorégraphiques qui leur sont propres, qui m’aideront à trouver des réponses, c’est par eux que change une  chorégraphie.
Aurait-il été envisageable pour toi de tenter de retrouver à l’identique la pièce de 1981,  jusque dans les moindre détails ? 
Ç’aurait été vain. J’ai à faire  avec le vivant,  le vivant du moment, le vibrant des corps présents,  et ceci échappe  au contrôle. Ce serait nié l’essence de la danse  que de tenter une approche  muséographique de cette  chorégraphie. Bien sûr j’impose une écriture mais le danseur  apporte sur le moment son énergie et ses propositions. Si l’un d’eux,  sur tel ou tel mouvement, trouve une solution  meilleure, je la garde.
Ton travail oscille  entre abstraction et figuration. Avec Ulysse pourrait-on dire plus  précisément qu’il est fait de ce langage gestuel  que tu as inventé, fait des petits gestes  quotidiens, décalés,  inattendus, drôles parfois,  qui s’introduisent malicieusement à  l’intérieur d’un langage scénique  classique. 
          Tout à fait. C’est en quelque  sorte un ballet qui n’a pas honte du mouvement, de tous les mouvements du corps, quelque  soit le milieu d’origine de ces mouvements. C’est une liberté qui nous vient des années 80, il n’est pas interdit de s’en réclamer  aujourd’hui. Je me demande  même s’il n’est pas urgent de le faire.
Propos recueillis par Claude-Henri Buffard

Après un séjour à New York à la fin des années 70 où il rencontre Merce Cunningham et découvre l’univers de la post-modern Dance (Yvonne Rainer, Lucinda Childs, Trisha Brown,...), Jean-Claude Gallotta fonde en 1979 à Grenoble – avec Mathilde Altaraz – le Groupe Émile Dubois qui devient en 1984 l’un des premiers Centres chorégraphiques nationaux, inséré dans la Maison de la culture de Grenoble, dont il sera également le directeur de 1986 à 1988.
Ulysse,1981, lui ouvre les portes de la reconnaissance internationale, jusqu’à Shizuoka où il dirige une compagnie japonaise de 1997 à 1999.Suivront notamment Daphnis é Chloé (1982,) Hommage à Yves P.(1983), Mammame (1985), Docteur Labus (1988), Presque Don Quichotte (1999), Nosferatu (à l’Opéra de Paris, 2001).
Attaché à ouvrir grand les portes de la danse contemporaine, il propose une série de pièces sur et avec « les Gens », dont Trois Générations (2004), et Racheter la mort des gestes (Théâtre de la Ville, 2012), où il mêle danseursprofessionnels et personnes de tous âges, de toutes corpulences, de toutes histoires. Puis son répertoire de plus de quatre- vingts chorégraphies s’enrichit au fil des années par le croisement de la danse avec les autres arts : le cinéma (il a lui-même réalisé deux longs-métrages), la vidéo, la littérature, la musique classique. Son Sacre et ses révolutions, en 2015, est présenté à la Philharmonie de Paris ; en 2016, il crée Volver avec la chanteuse Olivia Ruiz, à la Biennale de la danse de Lyon ; cette même année, son Groupe Émile Dubois, redevient compagnie indépendante. Il travaille également autour des figures du rock avec le triptyque My Rock, My Ladies Rock et la recréation de l’Homme à tête de chou en 2019 au Printemps de Bourges.
En 2020, il rend hommage à son premier maître, Merce  Cunningham, en créant le Jour se rêve, accompagné par le musicien  Rodolphe Burger et la plasticienne Dominique  Gonzalez- Foerster.
          Parallèlement, il développe une forme adaptée  à l’espace public, Climatic’ Danse, ainsi  que sa version pour enfants, Danse,  ma planète, danse! Il prépare  pour 2022 une création intitulée Pénélope versant féminin  et contemporain de son Ulysse originel. 
          Jean-Claude Gallotta est  hébergé avec sa compagnie à la  MC2:Grenoble. Il est également artiste associé du Théâtre du Rond-Point à Paris et de Scènes Vosges à Épinal.
Ulysse, hommage à Homère et à l’écrivain irlandais James Joyce, se veut « ballet blanc » dans tous les sens du terme. Les interprètes, sont emportés par des tourbillons de gestes tous plus excités et gourmands les uns que les autres. Ils se jettent à l’assaut de l’espace comme pour bouffer le monde et encore davantage. Appétit, fougue, amour de la danse, cet Ulysse solaire possède le panache de l’aventurier amoureux de la vie. Gallotta signe une chorégraphie savante, réseau de diagonales qui se croisent et se décroisent au gré de contrepoints vifs comme des changements d’humeur. Rosita Boisseau | Ina.fr
Pièce culte, référence d’une génération (). Ulysse est d’une redoutable précision d’écriture, utilisant les principes de la danse répétitive. Le chorégraphe a tiré le meilleur parti de la scénographie tout de blanc et de l’architecture très rigoureuse des lignes de construction. La danse de micro-gestes comme à peine osés, les portés, la multiplication des actions, désamorcent ce que la forme aurait pu avoir de froid. () C’est une pièce d’ironie, désinvolte et, pour toujours, adolescente. Philippe Verrièle, Danser Canal historique