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saison 2022/2023

FOCUS JEAN-CLAUDE GALLOTTA

DANSE | DÈS 12 ANS

Ulysse

Chorégraphie Jean-Claude Gallotta
Groupe Émile Dubois

Mardi 14 mars
20h | Durée 1h15

Grande Salle
Tarif A

Repris, revisité et réécrit, Ulysse poursuit son épopée et confirme toute sa modernité quarante ans après sa création.
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Plus de 40 ans après la première représentation d’Ulysse, Jean-Claude Gallotta propose une reprise de sa pièce emblématique au plus près de l’esprit originel, nourrie de l’énergie des danseurs d’aujourd’hui. Une chorégraphie intemporelle, d’une précision redoutable qui, dans un tourbillon de gestes, nous donne à voir toute la richesse de la nouvelle danse.
Les interprètes nous emportent dans une odyssée chorégraphique avec appétit, fougue et amour de la danse. Ils se jettent à l’assaut de l’espace, multiplient les portés, les arabesques… Sur la musique originale de Serge Houppin et Henry Torgue, Gallotta déploie son abstraction ludique et son humour pour nous offrir une ode à la liberté du corps en mouvement, au voyage et à la quête. Une page jouissive de l’histoire de la danse dont la beauté des tableaux ne manquera pas de vous éblouir !

Rencontre Avec Jean-Claude Gallotta
Mercredi 15 mars | 19h Auditorium du CRD Camille Saint-Saëns

La sélection bibliographique proposée par la librairie-café de Dieppe La Grande Ourse

Chorégraphie Jean-Claude Gallotta. Assistante à la chorégraphie Mathilde Altaraz. Dramaturgie Claude-Henri Buffard. Reconstruction et transmission Mathilde Altaraz et Thierry Verger. Avec Axelle André, Naïs Arlaud, Alice Botelho, Ibrahim Guetissi, Fuxi Li, Bernardita Moya Alcalde, Clara Protar, Jérémy Silvetti, Gaetano Vaccaro, Thierry Verger. Musique originale Henry Torgue et Serge Houppin. Lumières et scénographie Manuel Bernard. Assistant lumières Benjamin Croizy. Costumes Chiraz Sedouga.

© Photo : Guy Delahaye

Production : Groupe Émile Dubois / Cie Jean-Claude Gallotta. Coprods : Le Volcan – SN du Havre, Théâtre-Sénart – SN de Lieusaint. Soutiens : MC2 : Grenoble, Théâtre de l’Arsenal de Val-de-Reuil – SCIN art et création pour la danse. Remerciements : Yvesmarie Despails et l’Hexagone SN Arts Sciences / Atelier Arts Sciences.

Site de la compagnie

Pour qu’une pièce de répertoire soit reprise et remontée, il faut toujours un désir partagé, une conviction, un élan. C’est lors d’une rencontre avec Jean-François Driant, directeur du Volcan, Scène nationale du Havre que le projet de reprendre Ulysse, pièce fondatrice de 1981, s’est formé.
Souvent interrogé sur ces pièces qui ont contribué à faire exister en France la danse contemporaine et auxquelles il est fait depuis régulièrement référence, Jean-François Driant a eu l’idée d’en parler à Jean-Claude Gallotta.
Proposition opportune pour ce dernier puisqu’il s’est lui-même donné pour mission depuis de nombreuses années d’alterner créations et pièces de répertoire. Son Ulysse a connu plusieurs versions en près de quarante ans dont les célèbres Variations d’Ulysse que le chorégraphe a présentées à l’Opéra de Paris en 1995.

Pour fêter les 40 ans de cette chorégraphie ainsi que les 60 ans de la Maison de la culture du Havre, Jean- Claude Gallotta proposera une reprise d’Ulysse, avec l’énergie des danseurs d’aujourd’hui, au plus près de l’esprit de la version originelle.

C.-H.B.

Avec Ulysse, j’ai voulu rendre hommage à la chorégraphie, raconter de manière ludique l’architecture de l’espace.
Je n’ai pas voulu théoriser sur la danse mais plutôt jouer avec certaines situations du ballet moderne et classique en les truffant de détails et de mouvements personnels.
J’ai par exemple utilisé et parfois tordu le cou à la symétrie, à la perspective, aux entrées et aux sorties, aux pas d’ensemble, aux enchaînements entre le groupe et les solistes, aux duos, aux portés dédoublés, aux comptes, aux quatuors, à la multiplicité des centres, aux marches, aux arabesques, etc... Se sont rajoutés de manière naturelle, le côté sensuel et charnel des danseurs et quelques «fêlures» qui annoncent ou rappellent d’autres chorégraphies plus tourmentées.
Une fois la pièce construite il fallait lui donner un titre. Je décidais de l’intituler : Ulysse, car la complexité de la chorégraphie m’empêchait en tant que danseur de la pénétrer facilement. Comme le héros d’Homère j’y voyais là mon propre exil et l’impossibilité d’atteindre mes propres rivages chorégraphiques.
La musique océane d’Henry Torgue et Serge Houppin, le blanc rêvé des costumes m’influencèrent dans ce choix.
Avec ce titre, il était intéressant de voir apparaître toutes les correspondances qui pouvaient naître entre Homère, Joyce et la chorégraphie.
Je vous invite à partager ces correspondances, à éveiller le «soursik» qui sommeille en vous, et raviver nos rêves enfouis.

Jean-Claude Gallotta

Ulysse, 40 ans après... Cet Ulysse appartient à l’histoire chorégraphique, il est considéré  comme l’une des pierres angulaires de la nouvelle danse française. Quel était le contexte  à la création en 1981 ?
Au départ, je voulais faire un « event », à la manière de Merce Cunningham. Une continuité faite de « bouts » chorégraphiques déjà existants. Mais au-delà de la performance, je voulais voir si je pouvais maitriser une chorégraphie dans la durée, faire un event qui serait une œuvre entière. Un ballet, un vrai. Un ballet purement chorégraphique, sans livret, sans « théâtre », guidé par le seul mouvement.
Si cette pièce est devenue emblématique, c’est sans doute qu’elle est arrivée au bon moment. Peut-être, à cette époque, était-on lassé du néo-classique. En se rangeant sous la bannière « ballet », en proposant une forme longue de l’event, Ulysse a pu être perçu comme un des actes fondateurs ouvrant une nouvelle période chorégraphique.

Tu parles alors de « ballet blanc »...
Oui, lorsque j’ai débuté, j’ai voulu « faire comme », j’ai souscrit à cette idée que tout chorégraphe devait faire son ballet blanc, un peu à la manière de la plupart des compositeurs qui se sont essayés à la forme du Requiem. Le ballet « pur », céleste, immaculé, fasciné par l’idée de perfection, un ballet du mouvement pur. C’est ce que j’ai fait, à ma manière, Ulysse est un ballet blanc, mais mâtiné de Buster Keaton... !

Ulysse est l’œuvre à laquelle tu es revenu le plus souvent, tu as dit pourtant un jour que ce n’était pas ton œuvre préférée...
Pendant longtemps, j’ai pensé que cette pièce était trop classique. Je ne le dirais plus aujourd’hui. À force de la reprendre au cours des années j’ai vu au contraire que tout en restant la même elle pouvait changer de nature, qu’elle était plus malléable qu’il n’y paraissait, qu’elle contenait une modernité, qu’en la déclinant ainsi je pouvais la faire jouer avec chacune des époques qu’elle traversait.

En 2007, la reprise portait le nom de Cher Ulysse, la musique n’était plus la même, les  pendrillons du décor étaient « affalés » comme les voiles d’un bateau... tu proposais un  Ulysse qui cherchait à refléter une époque moins resplendissante que celle des années  80...
Oui, avec cette version de 2007 j’ai voulu en effet interroger ce moment de l’Histoire, le début du XXIème siècle, que nous traversions. En 2021, je souhaite positionner le spectacle autrement ; montrer davantage un art chorégraphique qui résiste aux fluctuations moroses de la société. Cet Ulysse 2021 ne se laissera pas, ou du moins pas consciemment, colorer par la tonalité de l’époque actuelle. Il ne la subira pas, au contraire, je voudrais en quelque sorte qu’il l’illumine. Ainsi, en revenant aux sources de 1980, je ne « nostalgise pas », loin de là, je réponds aux craintes, aux angoisses, à l’avenir incertain, par une pièce violemment vivante.

En 2021, peu de spectateurs auront pu connaître la version originale. Est-ce que cela a  compté dans ton choix de la reprendre ?
Je ne dirais pas que ça a compté dans mon choix, même si reprendre une pièce c’est toujours espérer connaître des spectateurs nouveaux. Non, je suis simplement content de m’y repencher. Cette pièce, maintes fois reprises, m’intéresse encore en tant que telle. Elle fait même naitre en moi aujourd’hui des envies de la prolonger. Je la pense désormais comme un premier volet d’un diptyque dont le second sera une sorte de ballet noir intitulé Pénélope.

As-tu déjà des intentions sur la façon dont tu vas aborder le travail en répétition ?
Je n’ai pas d’intention. Je ne veux pas en voir. J’attends d’être dans le studio de répétition. Ce sont les interprètes, avec les qualités physiques et chorégraphiques qui leur sont propres, qui m’aideront à trouver des réponses, c’est par eux que change une chorégraphie.

Aurait-il été envisageable pour toi de tenter de retrouver à l’identique la pièce de 1981, jusque dans les moindre détails ?
Ç’aurait été vain. J’ai à faire avec le vivant, le vivant du moment, le vibrant des corps présents, et ceci échappe au contrôle. Ce serait nié l’essence de la danse que de tenter une approche muséographique de cette chorégraphie. Bien sûr j’impose une écriture mais le danseur apporte sur le moment son énergie et ses propositions. Si l’un d’eux, sur tel ou tel mouvement, trouve une solution meilleure, je la garde.

Ton travail oscille entre abstraction et figuration. Avec Ulysse pourrait-on dire plus  précisément qu’il est fait de ce langage gestuel que tu as inventé, fait des petits gestes  quotidiens, décalés, inattendus, drôles parfois, qui s’introduisent malicieusement à  l’intérieur d’un langage scénique classique.
Tout à fait. C’est en quelque sorte un ballet qui n’a pas honte du mouvement, de tous les mouvements du corps, quelque soit le milieu d’origine de ces mouvements. C’est une liberté qui nous vient des années 80, il n’est pas interdit de s’en réclamer aujourd’hui. Je me demande même s’il n’est pas urgent de le faire.

Propos recueillis par Claude-Henri Buffard

Après un séjour à New York à la fin des années 70 où il rencontre Merce Cunningham et découvre l’univers de la post-modern Dance (Yvonne Rainer, Lucinda Childs, Trisha Brown,...), Jean-Claude Gallotta fonde en 1979 à Grenoble – avec Mathilde Altaraz – le Groupe Émile Dubois qui devient en 1984 l’un des premiers Centres chorégraphiques nationaux, inséré dans la Maison de la culture de Grenoble, dont il sera également le directeur de 1986 à 1988.

Ulysse,1981, lui ouvre les portes de la reconnaissance internationale, jusqu’à Shizuoka où il dirige une compagnie japonaise de 1997 à 1999.Suivront notamment Daphnis é Chloé (1982,) Hommage à Yves P.(1983), Mammame (1985), Docteur Labus (1988), Presque Don Quichotte (1999), Nosferatu (à l’Opéra de Paris, 2001).

Attaché à ouvrir grand les portes de la danse contemporaine, il propose une série de pièces sur et avec « les Gens », dont Trois Générations (2004), et Racheter la mort des gestes (Théâtre de la Ville, 2012), où il mêle danseursprofessionnels et personnes de tous âges, de toutes corpulences, de toutes histoires. Puis son répertoire de plus de quatre- vingts chorégraphies s’enrichit au fil des années par le croisement de la danse avec les autres arts : le cinéma (il a lui-même réalisé deux longs-métrages), la vidéo, la littérature, la musique classique. Son Sacre et ses révolutions, en 2015, est présenté à la Philharmonie de Paris ; en 2016, il crée Volver avec la chanteuse Olivia Ruiz, à la Biennale de la danse de Lyon ; cette même année, son Groupe Émile Dubois, redevient compagnie indépendante. Il travaille également autour des figures du rock avec le triptyque My Rock, My Ladies Rock et la recréation de l’Homme à tête de chou en 2019 au Printemps de Bourges.

En 2020, il rend hommage à son premier maître, Merce Cunningham, en créant le Jour se rêve, accompagné par le musicien Rodolphe Burger et la plasticienne Dominique Gonzalez- Foerster.
Parallèlement, il développe une forme adaptée à l’espace public, Climatic’ Danse, ainsi que sa version pour enfants, Danse, ma planète, danse! Il prépare pour 2022 une création intitulée Pénélope versant féminin et contemporain de son Ulysse originel.
Jean-Claude Gallotta est hébergé avec sa compagnie à la MC2:Grenoble. Il est également artiste associé du Théâtre du Rond-Point à Paris et de Scènes Vosges à Épinal.

Ulysse, hommage à Homère et à l’écrivain irlandais James Joyce, se veut « ballet blanc » dans tous les sens du terme. Les interprètes, sont emportés par des tourbillons de gestes tous plus excités et gourmands les uns que les autres. Ils se jettent à l’assaut de l’espace comme pour bouffer le monde et encore davantage. Appétit, fougue, amour de la danse, cet Ulysse solaire possède le panache de l’aventurier amoureux de la vie. Gallotta signe une chorégraphie savante, réseau de diagonales qui se croisent et se décroisent au gré de contrepoints vifs comme des changements d’humeur. Rosita Boisseau | Ina.fr

Pièce culte, référence d’une génération (). Ulysse est d’une redoutable précision d’écriture, utilisant les principes de la danse répétitive. Le chorégraphe a tiré le meilleur parti de la scénographie tout de blanc et de l’architecture très rigoureuse des lignes de construction. La danse de micro-gestes comme à peine osés, les portés, la multiplication des actions, désamorcent ce que la forme aurait pu avoir de froid. () C’est une pièce d’ironie, désinvolte et, pour toujours, adolescente. Philippe Verrièle, Danser Canal historique