Édito du directeur

Les artistes n’ont qu’une parole, celle qu’ils portent sur nos plateaux, nos écrans, celle qu’ils défendent et qu’ils assument.
Ils se mettent à nu, provoquent, interprètent, se séparent d’eux-mêmes pour mieux nous deviner, s’adressent à vous, se libèrent de nous, inquiètent, séduisent, sont gestes, regards, mouvements et textes…
Leur parole est tenue.
Ils ont signé avec le sensible et l’honneur d’être là, à vos côtés, en lumière, dans un principe de bonne conduite.
Nous accompagnons ces prophètes modernes et laïques et agissons au mieux pour que leurs projets aboutissent… soutenus, en cela, par nos partenaires publics, totalement présents… ou presque… dans cette mise en clarté.
Mais la clarté est aussi une histoire d’ombre… les soutiens affichés, les engagements annoncés et relatifs peuvent – dans l’ombre – se traduire aussi par des évitements, une amnésie de posture, une aphasie des responsabilités… rendant la culture davantage éloignée des préoccupations politiques, alors qu’elle devrait en être le centre et la plaque tournante.
Certains politiques travaillent pour les générations futures, d’autres ne pensent qu’aux prochaines échéances électorales… c’est un choix intellectuel et éthique.
On peut avancer à petits pas, en termes timides, prendre part – à son esprit défendant – au décervelage citoyen, croyant en la domination sur les hommes et s’affranchissant de l’empreinte sur les choses.
Le pouvoir, alors, n’est plus qu’ignorance et l’ignorance, une synthèse ostentatoire de nos lacunes… Tout cela dans une forme d’autoritarisme qui ne conduit pas à un ordre nouveau et libérateur – que nous appelons de nos voeux – mais à un ridicule certain.
Cependant, nous pouvons, toutes et tous, nous affirmer aristocrates de la pensée, voir loin, imaginer l’horizon de nouveaux projets, effacer le fait du prince face à la nécessité du respect de nos missions communes.
Amis politiques et ami public, je sais que nous avançons dans la même direction, celle de l’élévation de la pensée juste et non point portée par l’économie de courte vue.
La logique de l’art est symbolique, pas commerciale.
Nos engagements mutuels sont forts : les paroles données sont autant de signatures, les signatures scellées autant de paroles données. Même si nous savons – les uns et les autres – selon l’adage populaire, qu’il faut accepter d’être parfois le pigeon, parfois la statue.
Alors, avec les artistes et avec vous, cher public, lançons notre aggiornamento commun et retrouvons l’alacrité qui fut la nôtre – en des temps meilleurs… parfois plus éclairés !
Bonne saison 2022/2023 à toutes et à tous !

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Philippe Cogney
DIRECTEUR DE DSN – DIEPPE SCÈNE NATIONALE