18 musiciens, une histoire, des projections d'images et de films pour un concert hors norme.
— Le Surnatural Orchestra est un grand ensemble d'aujourd'hui à couleurs multiples et projets toqués, tel Esquif accueilli en mars 2017, qui mélangeait musiciens et circassiens dans une douce et belle folie.
— Tall Man sera un concert narratif qui inclura du texte dit, chanté, scandé, déclamé… et fidèle à l'esprit des concerts du Surnatural, où la spontanéité et l'immédiateté tiennent une grande place. Ce sera l'histoire d'un personnage quelque peu mythique, un homme à la fois méchant et proche de nous, traversé de rêves de calme. Qui est-il et à quelles fins exerce-t-il cette violence ? Où chercher la sérénité si ce n'est dans les champs de blé, la garrigue odorante ? D'autres intentions président à cette prochaine création : faire exister un moment de bal avec et au milieu du public, jouer des projections en contrepoint, jouer sur la puissance des masses sonores orchestrales en contraste avec de petites formes à un, deux ou trois musiciens…
— Attendons-nous à une nouvelle expérience, cette équipe est d'une générosité et d'une inventivité des plus enthousiasmantes !
Flûtes Fanny Ménégoz, Clea Torales. Saxophones Adrien Amey, Baptiste Bouquin, Jeannot Salvatori, Robin Fincker, Nicolas Stephan, Fabrice Theuillon. Trompettes Guillaume Dutrieux, Antoine Berjeaut et Julien Rousseau. Trombones Hanno Baumfelder, François Roche-Juarez, Judith Wekstein. Soubassophone Fabien Debellefontaine. Claviers, guitare Boris Boublil. Percussions Sven Clerx. Batterie Emmanuel Penfeunteun. Manipulations Elizabeth Saint-Jalmes ou Anne Palomeres (en alternance). Son Zak Cammoun, François-Xavier Delaby, Guillaume de la Villéon (en alternance). Lumières Michaël Philis. Régie générale Philippe Bouttier. Scénographie Elizabeth Saint-Jalmes et Michaël Philis.
© photo : Elizabeth Saint-Jalmes
Voilà bien des années que nous discutons d'une forme de concert narratif qui inclurait du texte dit, chanté, scandé... Il y a quatre/cinq ans, le metteur en scène Matthias Langhoff, avec qui nous fûmes un moment en rapport, commençait à réfléchir avec nous un spectacle qu'il imaginait à la façon de "l'Histoire du Soldat" : un livret (qu'il envisageait inspiré du texte de Gogol "Le Nez"...), et un orchestre (nous !) intégré à une scénographie et une mise en scène légère. Un orchestre en scène pour un spectacle musical. Un glissement certain vers le théâtre. Ce projet n'a pas abouti, Langhoff partant de son côté sur d'autres projets. Nous n'avons finalement pas, collectivement, cette envie de spectacle purement théâtral. Car si le désir de narration reste fort, nous voulons dans le même temps conserver l'esprit de nos concerts où la spontanéité et l'immédiateté tiennent une grande place, que ce soit dans le choix des morceaux joués (sur la base d'un "réservoir") que dans le déroulé du concert (durée, improvisations musicales ou parlées, interventions dans et avec le public...).
C'est ainsi que nous arrivons peu à peu à déterminer la forme de ce "Tall Man" (titre provisoire) à venir. La contrainte de départ est de trouver une forme narrative non figée qui permette une remise en jeu à chaque représentation. Nous imaginons une continuité sous forme de blocs, comprenant chacun un/deux moments de "la vie" de ce "Tall Man", et un/deux moments musicaux, pour le coup étroitement imbriqués, réfléchis pour "fonctionner" en bloc narratif (cette "narration" n'ayant d'ailleurs pas forcément à être comprise au sens strict par le public : il s'agit d'immerger plus que d'expliquer). Avec de 6 à 10 blocs, nous serions à même de tracer un parcours de notre personnage, à chaque fois différent en fonction du mode d'imbrication de ces blocs au cours du concert. Nous aurions là à la fois notre envie narrative, et la liberté de cheminement d'un concert. Si, lors d'une représentation, l'intérieur même d'un bloc venait à se développer musicalement, scéniquement et/ou narrativement outre mesure, rien ne nous empêcherait de considérer ce temps comme celui du spectacle entier. Chaque concert verrait l'invention d'un récit nouveau, structuré par ces enchaînements instinctifs décidés au fil de son déroulement. Chaque concert réinventerait la vie de ce Tall Man avec les pièces qui sont son puzzle mais qui, dévoilées ou non, dans un sens ou dans l'autre, laisserait au spectateur une impression différente.
A l'intérieur de ces modules, existent déjà des positionnements forts : faire exister un moment de bal avec et au milieu du public, jouer des projections en contrepoint (films, images et lumière), jouer sur la puissance des masses sonores orchestrales en contraste avec de petites formes à 1,2 ou 3 musiciens… De quoi pousser le spectateur dans ses retranchements et l'accompagner vers la félicité.
Pour cette création à venir, l'orchestre est actuellement en recherche de soutiens. Nous avons besoin de temps de résidence sur des lieux adaptés, et de partenaires en production.
La constitution d'un nouveau répertoire destiné à ce projet est en cours depuis un an environ. Six à huit morceaux existent déjà et ont été travaillés. Fort de ce matériau, nous avons profité d'une résidence de composition au théâtre des 2Scènes de Besançon pour expérimenter certaines de nos envies, en particulier l'utilisation du texte à l'intérieur de nos musiques, qui est la plus grande nouveauté pour nous. Trouver une façon de faire qui nous paraisse juste. Déclamé/scandé sur des séquences musicales, chanté, dit, chanté en choeur à la façon d'un gospel polyphonique... pas mal de chantiers furent ouverts en ce sens avec la matière musicale que nous nous étions auto-commandée en préambule de cette résidence. Il devient clair qu'avec notre façon d'avancer l'ensemble de nos matières conjointement (compositions musicales, imagerie et scénographie/lumière, propos narratif), non seulement une refonte de ces premières musiques sera nécessaire, mais aussi que de nouvelles compositions devront voir le jour (en particulier dans l'idée d'ouvrir le concert à l'idée du bal). Lors de notre prochaine résidence sur ce projet (juin/juillet 2017), nous prévoyons de mettre en cohérence musique et textes, avec un affinement du propos.
Un premier jeu de textes sur la figure du Tall Man a été jeté sous forme d'écriture poétique automatique (tout comme la musique : commande en interne). Il en ressort un personnage quelque peu mythique. Un homme à la fois méchant et proche de nous, traversé de rêves de calme. Tortionnaire universel, distribuant sa violence à l'instar d'un père fouettard, sans conviction mais de façon implacable. Qui est-il et à quelles fins exerce-t-il cette violence ? Comment s'y opposer si, tout en étant nous, l'on est un peu lui ? Où chercher la sérénité si ce n'est dans les champs de blé, la garrigue odorante… où tonnent les bombes ? Si cette première volée de textes mélange langue française, anglaise et allemande (pour des questions de sonorités et de tonalités des expressions propres à ces langues), le désir d'être aisément compris par le public nous portera sans doute par la suite à privilégier le français.
Depuis quelques temps, des pistes nouvelles se profilent pour la mise en lumière de l'orchestre. Et cette création en cours est l'occasion d'approfondir ces voies pleines de sens sur un fil narratif…
De la rencontre entre Michaël Philis, créateur et régisseur lumière sur le plateau, et Camille Sauvage, auteur-illustratrice compagne de l'orchestre depuis 15 ans, naît l'envie de travailler ensemble et de mélanger leurs matières respectives au service de l'orchestre.
Dans un premier temps, cette association donne place il y a trois/quatre ans à la création et l'utilisation de 40 abats-jour/pièce unique, chacun sérigraphié et monté dans des formats différents, formant un nuage au-dessus de la scène.
Puis, depuis deux ans environ, un homme lumière, dispositif en main, déambule au cours du concert au milieu des musiciens, du public, sur les passerelles de la salle, suspendu aux perches des projecteurs ou sur un escabeau, ajoutant des touches ponctuelles fixes ou mouvantes à l'éclairage traditionnel léger mis en place lors du montage. Ce dispositif technique à vue, affirme sa présence au cours des derniers concerts. Sa construction chaque fois renouvelée, la liberté et l'improvisation qu'il propose, dessine un parallèle évident avec l'approche du travail musical de l'orchestre. Autour des recherches personnelles de Camille Sauvage (qui se forme simultanément au travail d'animation et de traitement de l'image vidéo), l'envie de projeter des images narratives et abstraites se dessine. Un peu plus loin, se renforce l'idée de projeter non à partir d'un projecteur en fond de salle tel un ciné-concert, mais plutôt dans ce même esprit « d'homme lumière », et faire vivre un «homme projectionniste», se jouant de son appareil comme on manipule un projecteur d'éclairage : en le portant à mains libres.
Tout comme l'appareillage lumière, le dispositif de projection se promène donc dans l'espace, et ces dispositifs dits « techniques », mis à nu, font parti de la scénographie. Celle-ci mêle donc éclairages (ponctuels et classiques), subtilités lumineuses, lampes torches, scintillements, ombres portées, illuminations… et séquences projetées : évocations de l'histoire de notre homme sans tête (ou de son avatar : Tall Man…) ; les projections se matérialisant sur différents plans, éclairant et faisant vivre aussi bien les musiciens de l'orchestre, que le contexte de la représentation : premiers rangs ou milieu de salle, fond et arrière-scène, draps tendu en forme de pendrillonage, draps de chemise, mouchoirs de poche portés par les musiciens, leurs costumes propres ou accessoires de scènes personnalisés (impressions sérigraphiées…)
Trois personnes expérimentées et férues des projections en pellicule ont été consultées pour leurs précieux conseils : Stephano Canapa de l'Abominable, Sebastien Ronceray de la Cinémathèque Française et Joseph Lavandier acolyte de Csaba Palota• sur Manivelle Project. Suite à ces rencontres, nous décidons d'opter pour la projection en Super8 (coût de pellicule et de développement, investissement en matériel modestes). Les images seront captées avec une caméra numérique et les montages seront réalisés sur AfterEffect puis filmés avec une caméra Super8 sur un écran d'ordinateur. Ceci permet de la flexibilité de montage, de coût et une rapidité d'exécution.
En pratique, un ou plusieurs projecteurs pourront être utilisés pour une projection s'adaptant aux supports qu'elle croise au fil de la déambulation du projectionniste. Le choix du cinéma (plutôt qu'une projection vidéo), étant pensé d'une part en terme de puissance lumineuse, mais aussi et surtout en terme de qualité et grain des images projetées, ainsi que pour l'univers fortement onirique que transporte intrinsèquement l'imaginaire du cinéma et le support argentique dont elle est tirée, et qui s'ajuste dans l'esthétique des recherches graphiques de Camille Sauvage autant que dans les propositions musicales de l'orchestre…
Surnatural Orchestra est une formation de 18 musiciens, 4 techniciens, une graphiste, une administratrice. Un grand ensemble d'aujourd'hui à couleurs multiples et projets toqués. Depuis plus de 15 ans, nous nous produisons aussi bien en concert de type « répertoire », qu'en spectacle. Ces spectacles recouvrent différentes formes. Accompagnement de films muets façon ciné-concert avec des créations musicales spécifiques (La Zone, La Nouvelle Babylone), ciné-spectacle mêlant cinéconcert, comédie, danse, en un remaillage scénaristique sous forme poético-politique (Profondo Rosso)*, acoquinages divers avec l'univers du cirque (sous l'appellation La Toile, mais également avec la cie l'Immédiat/Camille Boitel), création cirquesque en collaboration avec les cies Inextremiste et Basinga (Esquif – spectacle actuellement en tournée)… Ce serait peu dire que les portes sont ouvertes : elles ont depuis longtemps été démontées.
* ayant aussi donné lieu à la parution d'un livre-disque (Profondo Rosso, notes sur un ciné-spectacle) regroupant une douzaine d'auteurs…