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saison 2016/2017

Les Grandes Eaux

  • THÉÂTRE
  • MARDI 24 JANVIER
  • 20H
  • GRANDE SALLE
  • DURÉE : 1H10
  • TARIF A
  • RÉSERVER
  • SÉANCE SCOLAIRE : MER. 25 JAN. 10H

TEXTE ET MISE EN SCÈNE ANNA NOZIÈRE

LA POLKA COPRODUCTION DSN

 

Patrick s’est bêtement étouffé avec une paupiette de veau. Mourra, mourra pas ?

L’instant est grave, Patrick vient de mourir, à table. Dans sa maison, dans cette pièce, un cortège de femmes se forme. Tout d’abord il y a Gilda, sa voisine : elle connaît un rituel de résurrection qu’elle a expérimenté avec succès sur sa chouette Marilule. Nadine (une amie), fascinée par cette histoire, réussit à convaincre Rose (une autre amie), Irène (la femme de Patrick), Carole (sa maîtresse) et Véronique (sa soeur) de passer la nuit sur place et de ressusciter Patrick, toutes ensemble. Alors Gilda et son tambour chamanique mènent la cérémonie, le corps et l’âme de Patrick sont entre les mains de toutes ces femmes…
Les Grandes Eaux est une comédie burlesque qui traite de notre rapport à la mort, aux défunts, au deuil, à cette expérience viscérale que l’on doit traverser quand on perd un proche. Au fond, il est question de notre tentative d’intégrer quelque chose de cette perte, de notre impuissance, de l’impermanence des choses, de la fragilité de notre existence. À la surface, il est question d’en rire.

DISTRIBUTION

Texte et mise en scène Anna Nozière • Avec Fabrice Gaillard, Claude Guyonnet, Sofia Hisborn, Kristel Largis Diaz, Ana Karina Lombardi, Diane Regneault, Flore Taguiev • Scénographie Alban Ho Van. Son Loïc Lachaize. Lumière Fabrice Barbotin. Costumes Cécile Léna. Assistante mise en scène Charlotte Buosi. Conseiller artistique Patrick Haggiag. Assistante scénographie Ingrid Pettigrew. Régie générale Gilles Muller. Régie lumière Laurent Beucher. Régie son Benoît Lepage. Administration et production Karine Branchelot et Laura Aknin.


Production La Polka. Coproduction Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine, l’OARA - Office Artistique pour la Région Aquitaine, DSN - Dieppe Scène nationale, Les Quinconces - l’Espal du Mans, Le Canal - Théâtre du Pays de Redon - scène conventionnée pour le Théâtre. Avec le soutien de l'Adami et la participation artistique du Jeune Théâtre National. Avec l’aide des Tréteaux de France à Pantin et de la Fabrique des Arts à Malakoff.
Anna Nozière a reçu pour Les Grandes Eaux la bourse d’écriture dramatique de l’OARA

© photo : La Polka, Isabelle Jouvante, Elsa Revol

Site de la compagnie

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Carte blanche à Anna Nozière
Macbeth quand même

"Dans une scénographie simple, 7 personnages traversent 32 séquences. Le découpage cinématographique crée des champs et des contrechamps. Et beaucoup de rythme. Chaque scène doit trouver sa fulgurance. Les corps, incarner l’humour des didascalies au premier coup d’œil. C'est une question de musicalité. Cela suppose de diriger les acteurs comme on dirige un orchestre. Lorsque j'ai trouvé le rythme jubilatoire, je cherche la vérité des scènes. Car ce qui me passionne, c’est d’entretenir une relation étroite entre le comique et la profondeur des choses. Dans ce travail, je pense beaucoup aux spectateurs, à la cathartique du théâtre. Je parle de ce qui résiste en nous lorsque nous sommes placés devant notre condition de mortels... et mon pari, simple et ambitieux, est de fédérer le public dans le rire."

Anna Nozière

La mort est un mystère qu’on a besoin de se représenter. Toute culture, toute religion en donne une image, toute philosophie la regarde. Nous en avons nous-même une idée, fondée sur notre expérience et sur l’immense inventaire de tout ce qui a déjà été dit et montré, de ces gravures désuètes représentant un squelette vêtu de noir et sa faux, à des histoires contemporaines dont chacun veut plus ou moins entendre parler, comme celles de personnes cliniquement décédées qui reviennent témoigner de leur « passage », ou encore celles d’un médium en contact avec l’au-delà, à qui l’on prête du crédit ou qu’on prend pour un charlatan. Aussi lors d’un dîner entre amis, s’il arrive que vienne sur la table le sujet de « ce qu’il y a après la mort », chacun de nous aura sans doute un avis à donner, même incertain, sur la question.

En général, la disparition de quelqu’un qu’on aime nous arrache au folklore de cet éternel débat et nous plonge dans une expérience plus viscérale. On ressent notre peine, parfois notre douleur profonde, dans une série d’étapes successives qui porte le nom de deuil, et de cela il nous est plus difficile de parler à table.

Mais au fond, toute représentation spirituelle, culturelle ou philosophique de la mort, comme tout deuil, ou encore toute cérémonie orchestrée à l’occasion d’un décès, parlent d’une même tentative d’intégrer quelque chose de cette perte qui nous renvoie sans cesse à notre impuissance, à l’impermanence des choses, à la fragilité de notre propre existence.

Les Grandes Eaux traite avec humour de cette tentative, de ce qui résiste en nous lorsque nous sommes placés devant notre condition de « mortels ». L’histoire de ces femmes essayant de ressusciter un homme, qui constitue de fait une métaphore de la séparation amoureuse, renforce la cocasserie du propos : il faut voir comme elles s’accaparent le corps du défunt ! Sous la comédie délurée, une rivière souterraine charrie des questions primitives et reflète notre posture arbitraire face à la mort…

Anna Nozière

Nadine – Irène, je me permets de vous parler de façon très officielle. Cela va être difficile de me croire,
mais selon ce manuel scientifique, il semblerait que Patrick ait la possibilité de revivre un jour.

 

J’ai commencé à travailler sur Les Grandes Eaux en rêvant des personnages féminins hauts en couleur. La question du deuil s’est imposée plus tard, d’elle-même. Je l’ai saisie immédiatement. Ce qui m’a alors intéressée est de confronter mes personnages au vacarme de leur souffrance. Elle générait chez ces femmes une telle énergie !

Plus tard encore, en travaillant la fin de la pièce, j’ai réalisé combien la vie est faite de pertes successives, et qu’aussi étrange que cela puisse paraître, consentir à l’idée de cette perte nous rend foncièrement vivant.

Plus les prises de conscience sont tardives, plus elles sont précieuses, parce qu’elles me renseignent sur ce qui résiste en moi dans l’exercice de l’écriture et sera comme toujours le plus fort de l’oeuvre. La comédie n’échappe pas à cette règle. Au contraire l’humour, dans mon écriture, vient se coller aux endroits sensibles.

Dans ce travail, je pense beaucoup aux spectateurs, à la cathartique du théâtre. Mon pari, simple et ambitieux, est de fédérer le public dans le rire.

 

Carole (grave et digne) – Vous savez, Irène, j’en ai bavé. Comme un escargot.

Anna Nozière

On ne manquera pas de me demander si Les Grandes Eaux est « une pièce de femmes » … À cette question, qui en dit long sur cette réalité qui consiste à regarder les femmes comme une minorité alors qu’elles représentent la moitié de l’humanité, et que les productions qui distribuent une majorité écrasante d’hommes ne soulèvent jamais de questions de genre, je dirais qu’il me tient à coeur de montrer des personnages féminins dans leur sauvagerie naturelle, dans leur archaïsme instinctif, car, dans l’immense majorité des spectacles que nous voyons, cette réalité est cruellement absente. Je dirais aussi que, ne pouvant échapper au regard que l’on continue de porter sur les femmes, je suis consciente que la proportion de ces personnages féminins donne une sensation « de communauté », crée du sens, et raconte quelque chose des rapports homme - femme, ce avec quoi je joue évidemment.
Je répondrais enfin que pour autant, les thèmes soulevés par cette histoire de résurrection ne sont pas plus spécifiques aux femmes qu’ils ne seraient réservés aux hommes.

Notre rapport au temps et à la vieillesse
Notre rapport au pouvoir et au territoire
Notre rapport au désir
Notre rapport à notre propre violence…

 

Irène – J’ai fait l’amour avec un autrichien, Konrad Kafmüller, et bien, je n’ai pas aimé. Et une autre fois, avec un anglais, Bill Baker.
Et bien, je n’ai pas aimé non plus. Et avec Patrick ça ne me dit rien.

Anna Nozière

Anna Nozière commence le théâtre à 13 ans dans un petit village de 800 habitants, en Limousin. Des tréteaux, une bétaillère transformée en coulisses, des phares de voitures soudés à d’énormes boîtes de conserve en guise de projecteurs (que manipulent en direct des techniciens assis sur des chaises d’arbitre de tennis, avec des gants de cuisine pour se protéger de la chaleur!), une console d’éclairage fabriquée avec un programmateur de lave­‐linge et des boutons­‐poussoirs de vieilles Citroën...sont la marque de fabrique de sa troupe d’adolescents.

Vingt ans de théâtre amateur plus tard, elle se consacre à l’écriture de LES FIDELES, Histoire d’Annie Rozier, un texte à la fois burlesque et intime, point de départ d’une production ambitieuse (pièce pour 10 personnages) qu’elle passera plus de trois ans à défendre auprès d’un réseau professionnel qu’elle ne connaît pas.

Lauréate de l’aide à la création du CNT, repérée par le comité de lecture du CDN de Sartrouville (alors dirigé par Laurent Fréchuret) et publiée aux Solitaires Intempestifs, elle parvient finalement à convaincre et passe des tréteaux du village au Théâtre national de Bordeaux en octobre 2010. Le spectacle est sélectionné par la charte ONDA et le festival Impatience (Odéon – Théâtre de l’Europe). Il part en tournée jusqu’au printemps 2012.

En septembre 2012, au Théâtre national de La Colline, Anna Nozière créé LA PETITE, qu'elle écrit au plateau, et au fur et à mesure des représentations. Un spectacle controversé à sa sortie, qui trouve son souffle et amènera toute l’équipe à conduire des débats passionnants avec le public lors d’une belle et heureuse tournée. Une expérience fondatrice pour la Compagnie. Le texte est lauréat de l'aide à l'Écriture du CNT, de la bourse du CNL, et de la bourse d'écriture dramatique de l'OARA.

A l'issue de cette tournée, la nouvelle équipe du Centre dramatique national de Sartrouville propose à Anna Nozière d’écrire et de mettre en scène « une petite forme tout-‐public à partir de 6 ans, à jouer dans un carré de 4 mètres sur 4, qui doit se monter en 2 heures et rentrer dans le coffre d’une Kangoo ». Ce sera JOSEPHINE (LES ENFANTS PUNIS), créé en janvier 2014 dans le cadre de la biennale Odyssées, et qui tournera 4 saisons. Le texte est publié chez Actes Sud, collection Héyoka (illustrations Marie Saarbach).

Les Fidèles, La Petite et Joséphine forment un triptyque sur l'enfant et la famille.

La Polka

À l’issue de ce triptyque, vécu comme un coup d’envoi exaltant mais aussi périlleux, qui lui demande d’apprendre très vite à travailler « autrement », il semble capital à l’auteure et metteure en scène de prendre du recul et de faire le point sur son travail et sa compagnie.

Elle partage alors une réflexion avec les artistes qui l’accompagnent. Cette réflexion l’amène à considérer les besoins de la compagnie, à regarder ses forces, et enfin à organiser le travail en prenant le temps de la réflexion pour construire un projet artistique dans la durée. C'est dans cette dynamique qu'est créée La Polka.

Un nouveau cycle de trois spectacles se prépare... LES GRANDES EAUX est le premier spectacle du cycle.

Avec burlesque et cocasserie, la compagnie continue d'y explorer ses thèmes de prédilection : la cohabitation des morts et des vivants, les frontières entre espaces intérieur et extérieur, la confrontation des mondes visibles et invisibles...

Elle continue également de défendre la place des femmes sur le plateau.

À partir d’octobre 2016, Anna Nozière sera artiste associée à la Scène nationale de Dieppe, notamment pour créer des liens entre théâtre et cinéma. Dans le cadre de la formation continue, elle a intégré sur concours la promotion de scénaristes 2014 de la FÉMIS, et obtenu son diplôme d’Etat de scénariste en avril 2015.